Messages Contemporains 2002

Les femmes autour de Jésus

Judas - reçu par H____ le 22 Mai 2002, Cuenca, Équateur.

Mon cher frère, tu te souviens de ce que je t’ai dit il y a déjà plusieurs jours, que Jésus a prêché aux païens de la Décapole, sans grand succès, d’ailleurs. Je tiens à ajouter à cette occasion que cela changea très rapidement, et qu’ultérieurement, les communautés Chrétiennes de la Décapole ont joué un rôle très important dans le développement de l’Église primitive. Revenons cependant à l’année 26.

Après l’échec de sa prédication parmi les païens, Jésus consacra le reste de l’année à renforcer son influence et celle de ses partisans dans les zones autour du lac de Tibériade. Il a senti qu’il aurait besoin, à l’avenir, d’une base fiable d’où il pourrait lancer ses voyages missionnaires, si je peux utiliser ce mot moderne.

Un jour d’été, alors que nous étions à Magdala, ville bien connue pour ses nombreux ateliers de tissage et où nous cherchions refuge contre le soleil brûlant de midi, sous les branches d’un sycomore florissant, une foule rauque d’hommes et de femmes nous approcha soudainement. La foule impétueuse poussait et traînait une pauvre femme qui pleurait désespérément et fut jetée devant le maître.

Oui, il s’agit d’une célèbre histoire contenue dans l’Évangile selon Jean. Elle commence ainsi :

…tandis que Jésus s’en allait au Mont des Oliviers. Mais, dès le matin, il alla de nouveau dans le temple, et tout le peuple vint à lui. S’étant assis, il les enseignait…

Qu’est-ce-que le Mont des Oliviers et le Temple ont à voir avec Magdala ? Une explication est donc nécessaire.

De nombreux spécialistes, pour une raison très simple, ne considèrent pas ce passage dans Jean comme authentique. Il est absent de nombreux manuscrits plus anciens et dans d’autres, il semble avoir été inséré en différents endroits, dans des contextes différents. Il est évident qu’il ne fait pas partie du texte original. Néanmoins, je t’assure qu’il décrit une scène qui s’est réellement déroulée à Magdala, comme je l’ai dit. Cette histoire et quelques autres ont circulé indépendamment des écrits les plus anciens des Évangiles, elle fut incorporée par la communauté Johannite, estimant qu’elle reflète, de façon classique, l’attitude du Maître et ils avaient tout à fait raison. Ensuite, l’histoire se poursuit ainsi :

Alors les scribes et les Pharisiens amenèrent une femme surprise en adultère, la plaçant au milieu du peuple, ils dirent à Jésus : Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère. Moïse, dans la loi, nous a ordonné de lapider de telles femmes : toi donc, que dis-tu ?…

Tu comprends que la formule stéréotypée, « scribes et Pharisiens » date d’une époque ultérieure, cette appellation fut appliquée aux opposants de Jésus après la destruction de Jérusalem, alors que les Sadducéens n’existaient plus.

Ils disaient cela pour l’éprouver, afin de pouvoir l’accuser. Mais Jésus, s’étant baissé, écrivait avec le doigt sur la terre.

En fait, ce n’était pas des opposants à Jésus, mais des Juifs furieux de l’infidélité d’une femme mariée. Ils se sont approchés du Maître pour demander son avis. Par ailleurs, il convient de noter que Jésus a griffonné, avec son doigt dans la poussière, ce qu’il aurait difficilement pu faire dans les cours du Temple recouvertes de mosaïques.

Comme ils continuaient à l’interroger, il se releva et leur dit: « Que celui de vous qui est sans péché jette le premier la pierre contre elle. »

Et s’étant de nouveau baissé, il écrivait sur la terre…

La légende raconte que Jésus écrivait les noms de tous ceux coupables d’adultère parmi la populace qui avait traîné la pauvre femme devant lui. Mais ce n’est pas vrai, il se reposait simplement sous l’arbre, « se balançant avec son âme » comme les Allemands disent, c’est-à-dire, se détendant et rêvant les yeux ouverts.

Quand ils entendirent cela, accusés par leur conscience, ils se retirèrent un à un, depuis les plus âgés jusqu’aux derniers ; Jésus resta seul avec la femme qui était là au milieu.

Alors s’étant relevé, et ne voyant plus que la femme, Jésus lui dit : « Femme, où sont ceux qui t’accusaient ? Personne ne t’a condamnée ? »

Elle répondit: « Non, Seigneur. » Et Jésus lui dit : « Je ne te condamne pas non plus : va, et ne pèche plus. »

Tu as toujours aimé cette histoire, récit typique de Jésus, montrant son amour, son affection et sa grandeur.

C’est vrai, la Loi de Moïse exigeait la mort en cas d’adultère :

Deutéronome 22:22 : Si l’on trouve un homme couché avec une femme mariée, ils mourront tous deux, l’homme qui a couché avec la femme, et la femme aussi. Tu ôteras ainsi le mal du milieu d’Israël.

Note que seule la femme a été traînée devant Jésus. Parmi les hommes, il y avait beaucoup plus de tolérance.

La position sociale des femmes à Jérusalem était vraiment déplorable. Elles n’avaient pratiquement aucun droit, elles n’avaient aucune dignité et elles n’avaient aucune autonomie. Les hommes pouvaient divorcer de leurs femmes, mais les femmes ne pouvaient jamais plaider en faveur d’un divorce.

Les fils étaient toujours préférés aux filles par leurs parents et dans de nombreuses familles, la naissance d’une fille était considérée comme une grande calamité. Si un couple ne pouvait pas avoir d’enfants, la faute en revenait toujours à la femme.

Lors de procès, les femmes ne pouvaient jamais servir de témoins. De nombreuses femmes furent lapidées après un viol, on les considérait adultères car elles n’avaient pas de témoins pouvant expliquer ce qui était vraiment arrivé ! Bien entendu, généralement, les contrevenants ne cherchaient pas à manifester publiquement leurs méfaits.

L’attitude de Jésus envers les femmes en général, était exceptionnelle, pleine de respect et de gratitude. Nous ne comprenions pas cela – pour nous, les femmes n’étaient rien. Dans les invitations, les femmes n’étaient pas comptées, leur voix n’avait aucun poids, elles étaient simplement un mal nécessaire.

Dans l’Évangile de Thomas, tu peux trouver cette phrase significative :

Simon Pierre leur dit : « que Mariam (Marie Madeleine) sorte de chez nous car les femmes ne sont pas dignes de la vie. »

Jésus a dit : « voici que je l’attirerai afin qu’elle devienne mâle pour qu’elle aussi soit un esprit vivant semblable à vous mâles. Car toute femme qui se fera mâle entrera dans le royaume des Cieux. » - Logion 114

Des paroles difficiles, ne penses-tu pas? Bien sûr, il y a eu beaucoup de frictions entre les hommes et les femmes parmi les disciples de Jésus. En fait, les femmes ont mieux compris son message et elles ont généralement implanté le Christianisme au sein de leur famille, tandis que leurs maris se distinguaient souvent par leur indifférence et leur incapacité à saisir ce que le Maître enseignait. Les femmes auraient mérité le rôle de leaders du mouvement Chrétien à ses débuts, mais en raison de l’incompréhension masculine et à cause des préjugés masculins, elles ont été reléguées au second plan.

Jésus a essayé d’enseigner à égalité les hommes et les femmes, nous démontrant par son exemple, le respect qu’elles méritaient, mais nous ne comprenions pas et nous ne voulions pas comprendre. Jésus a dit à plusieurs reprises que les femmes pouvaient hériter, tout comme les hommes, du Royaume des cieux, mais observe les paroles qui, ici, ont été mises dans la bouche du Maître. N’oublie pas l’histoire d’une congrégation religieuse blanche en Géorgie dans le sud des États-Unis. Quand une des personnes présente demanda au révérend « Est-ce que les nègres peuvent entrer au paradis ? ». Il répondit, « Bien sûr, mais tout d’abord, ils doivent devenir Blancs.»

C’est la même chose, exactement la même chose ! Une attitude confirmée de l’ignorance et du manque d’amour.

Regarde, par exemple, ce que l’Évangile de Thomas nous dit en outre :

Jésus a dit : « deux reposeront là sur un lit, l’un mourra l’autre vivra »

Salomé a dit : « Qui es-tu homme ? De qui es-tu né, Tu es monté sur mon lit et tu as mangé à ma table. »

Jésus dit : … - Logion 61

Nous n’avons pas besoin de nous intéresser à la réponse de Jésus. Le fait qu’il était monté sur le lit de Salomé ne signifie pas qu’il avait sauté dans son lit, mais plutôt, qu’il occupait la place adjacente à Salomé à la table où les invités se couchaient pour dîner. De ceci nous pouvons dire que Salomé pouvait participer, comme disciple à part entière, aux réunions de Jésus et elle ne fut pas la seule femme à jouir de ce privilège. De plus, elle occupait une place d’honneur dans cette histoire, au côté du Maître. Ce passage, si souvent mal interprété, signale l’égalité dont les femmes jouissaient aux yeux du Maître, une égalité qui disparut après la mort de Jésus. Jésus a fait l’impensable au vu de la société.

En outre, c’est Salomé qui s’est enquis de la transformation de l’âme et du rôle des sexes dans la vie éternelle. Et Jésus lui répondit :

« Tu piétineras les vêtements de la honte et les deux deviendront un et le mâle ainsi que la femelle ne seront ni mâle ni femelle. »

Les quelques femmes mentionnées dans le Nouveau Testament, telle Marie, la mère de Jésus, et Marie Madeleine, n’ont pas eu la vie facile avec nous. Elles étaient des « femelles » que nous traitions avec jalousie, « parce qu’elles occupaient indûment des positions, proches de Jésus, que nous méritions ». Et pour le public masculin, elles n’existaient simplement pas. Mais elles, avec leur travail silencieux, étaient capables de recruter plus d’adeptes que nous le pouvions avec nos ferventes interventions sur les marchés des villes. Leur récolte fut abondante. Et notre résistance obstinée à reconnaître leur tâche était encore plus grande.

C’est tout pour aujourd’hui.

Que Dieu te bénisse.

Judas.

Note de l’auteur : Au sujet de Salomé, je ne sais pas qui elle était, peut-être l’épouse de Zébédée ? Elle s’appelle Salomé dans la Bible. Mais son vrai nom devait être « Shlomit », ce prénom était aussi fréquent que Marie, Anne et Jeanne en français.

Je suppose qu’elle était une de ces femmes qui rejoignit Jésus avec Marie-Madeleine. Ainsi, elle aurait été avec lui presque depuis le début.

Dans l’antiquité, on prenait les repas couché sur des banquettes près de tables en U. Les places pour les invités étaient sur la courbure extérieure du « U », le côté intérieur était réservé aux serviteurs. La place d’honneur était au milieu de l’U, c’est-à-dire si on regarde la lettre, au point le plus bas. C’était la place de Jésus.

Par exemple, lorsque la Bible mentionne que Jean pose sa tête sur la poitrine de Jésus, c’était la seule façon d’être en mesure de lui parler quand il était couché devant lui, avec son dos vers Jésus.

Donc, le message indique simplement que les femmes pouvaient occuper les places d’honneur dans la société de Jésus, du moins durant sa vie.

H.

© Geoff Cutler 2013

Lien vers les messages des années 2002

Lien vers la liste des messages contemporains classées par année