Messages Contemporains 2002

Les Samaritains, deuxième partie

Judas - reçu par H____ le 1 Mai 2002, Cuenca, Équateur.

Hier nous avons parlé de l’histoire de la séparation de l’ancien Royaume de David et de Salomon en deux États indépendants, Juda au sud et Israël dans le Nord.

Le puissant pays de l’Assyrie, pendant la majeure partie des deux siècles d’indépendance d’Israël, a souffert de stagnation sous une série de rois faibles et ineptes. Les dirigeants accumulaient progressivement beaucoup de pouvoir, et le pays était en grand danger de s’écrouler.

Cependant, un jour, un soldat expérimenté, durci par de nombreuses batailles et portant le nom de Pulu, s’empara du trône à Ninive, la capitale de l’Assyrie et rétablit le strict contrôle central, menant plusieurs guerres d’expansion. Malheureusement pour la « souris Israélite » qui a osé rugir, ils ont affronté directement ce roi impitoyable qui n’a pas une seconde hésité à dévaster le pays d’Israël en représailles. Seule la ville de Samarie a résisté aux attaques des conquérants. Pulu serait plus tard connu comme le roi Tiglath-Pileser III.

A la mort de Pulu, Salmanazar V lui succéda, mais il fut assassiné durant le siège de la ville. Seul « l’empereur juste » Sharrukin, connu sous le nom de Sargon II, s’avéra capable de conquérir la ville. Elle fut détruite. 27 000 prisonniers environ furent emmenés dans sa capitale, des anneaux en laiton insérés dans la lèvre supérieure afin d’être conduits comme du bétail à l’abattoir. Les Assyriens étaient célèbres pour leur cruauté, une notoriété bien méritée.

Ultérieurement, Sargon et ses successeurs furent en mesure d’étendre les limites de l’empire Assyrien, conquérant même le sud de la Mésopotamie et l’Égypte jusqu’à la Nubie. Mais la gloire terrestre ne dure pas éternellement. Plusieurs événements, et, parmi eux, l’invasion de hordes barbares, les Scythes, ainsi qu’une alliance entre les Chaldéens et les Mèdes, affaiblirent l’empire qui fut finalement conquis par les Mèdes et les Chaldéens, lesquels divisèrent le pays entre eux. La Palestine tomba sous l’influence des Babyloniens Chaldéens.

Les Hébreux qui avaient été emmenés en exil par Sargon n’ont jamais regagné leur pays. Ils périrent à l’étranger, ou se mélangèrent avec la population locale. Les Hébreux restés dans cette région, l’ancien Royaume d’Israël, ont continué avec les traditions de leurs ancêtres et leur culte de l’Éternel. Finalement, un centre de culte, un haut lieu, s’est imposé, le mont Garizim, où, selon la tradition, Abraham avait offert son fils Isaac en sacrifice à Dieu.

Les étrangers, qui avaient été introduits en Israël en tant qu’administrateurs par les Assyriens, se convertirent à la religion de la population locale, car c’était la coutume d’adorer les dieux locaux, dans ce cas, un seul Dieu, Yahvé. Et bien entendu, eux et leurs descendants se sont mélangés, au cours des années, avec les Hébreux indigènes.

Le royaume du sud, Juda, subira, ultérieurement, un sort très semblable à celui de ses voisins du nord. Dans le grand jeu du pouvoir, Juda eut à choisir entre l’Égypte et Babylone, cependant le roi à Jérusalem misa sur le « mauvais cheval » confrontant ouvertement Babylone. Juda fut conquis, sa capitale, Jérusalem, détruite, et une partie de sa population, encore une fois, nous parlons de la haute société, fut emmenée en captivité à Babylone. Mais dans ce cas, les Babyloniens ne remplacèrent pas les personnes déportées par des populations étrangères, mais ils choisirent un Juif, Gedalyahu, comme administrateur du pays conquis. Bien entendu, tous les Juifs n’ont pas été déportés, mais seulement un petit nombre. En bref, la nomination d’un administrateur signifie qu’il y avait encore quelque chose à administrer, n’est-ce pas ?

Gedalyahu fut assassiné par des Juifs nationalistes, ce qui provoqua une nouvelle vague de fureur Babylonienne sur le pays, provoquant la déportation de milliers de rebelles. Les Babyloniens, contrairement à leurs prédécesseurs assyriens, traitèrent correctement leurs prisonniers, et leur permirent de vivre selon leurs coutumes, en liberté relative, sur les rives du fleuve Euphrate.

La culture Juive a prospéré en Mésopotamie, et quand, enfin, après 150 ans, les Perses ont conquis l’empire, le roi Cyrus donna la permission aux Juifs de retourner dans leur pays, mais relativement peu d’entre eux entreprirent le voyage de retour. Ils savaient ce qui les attendait dans leur ancienne patrie : des paysans rustiques, des ruines, du sang, de la sueur et des larmes. Le confort de Babylone s’avéra plus fort que le nationalisme.

La reconstruction du Temple détruit par les Babyloniens 150 ans plus tôt, décidée par Cyrus, fut certainement la tâche prioritaire des personnes rapatriées. Elles trouvèrent, parmi les paysans Juifs vivant autour de Jérusalem, beaucoup de mains prêtes à les aider dans leur entreprise sacrée. Même leurs voisins du Nord, maintenant appelé « Shomronim » (Samaritains) offrirent leur aide. Cependant, les Juifs rejetèrent leur offre. Une hostilité croissante se développa entre les deux peuples, qui marquera toute leur histoire future.

Et maintenant, mon cher frère, je voudrais clarifier certains faits qui, traditionnellement, ne sont pas bien compris et qui sont enseignés d’une manière complètement déformée.

  1. Les Samaritains ne sont pas un peuple métis, un mélange de nombreux immigrants de l’empire Assyrien et des quelques Israélites qui étaient restés dans leur pays. Bien sûr, il y a eu quelque mélange, tout comme il y a eu un mélange entre les Juifs et d’autres personnes. Crois-tu que les anciens habitants de Canaan, qui vivait là avant l’arrivée des Hébreux, avaient disparu ? Avaient-ils été tous anéantis, comme le suggère la Bible ? Certainement pas. Pourquoi crois-tu qu’à l’heure actuelle un Juif de l’Allemagne ressemble à un Allemand, un Juif de la Russie ressemble à un Russe et un Juif du Yémen ressemble à un Yéménite ? N’est-ce-pas le mélange qui en est la cause ? Tragiquement, le principe d’être un Juif, c’est-à-dire le principe religieux, a donné lieu à une compréhension raciste. L’idée d’une « race pure » est une fiction qui, malheureusement, même à l’heure actuelle, injecte du poison dans le cœur de beaucoup. Les Samaritains, en fait, sont dans leur culture, leur langue, leur religion, même dans leurs gênes, des descendants des anciennes tribus Hébraïques du Nord. Je vais te donner un exemple très simple. Tu peux avoir une idée du nombre de personnes qui ont pu rester, dans ce qui était autrefois Israël, en comparant avec les moins de 30.000 qui furent déportés. En considérant le passage suivant de la Bible, extrait du Second Livre des Rois 15:19- 20 : « Pulu, roi d’Assyrie, vint dans le pays; et Menahem donna à Pulu mille talents d’argent, pour qu’il l’aidât à affermir la royauté entre ses mains. Menahem leva cet argent sur tous ceux d’Israël qui avaient de la richesse, afin de le donner au roi d’Assyrie ; il taxa chacun à cinquante sicles d’argent. Le roi d’Assyrie s’en retourna, et ne s’arrêta pas alors dans le pays.… » . Ceci est arrivé alors que le roi d’Israël essayait toujours de maintenir sa relative indépendance, en payant des dommages et en reconnaissant sa condition de vassal du roi Assyrien. Mais analysons les chiffres : un talent d’argent était l’équivalent de 3000 shekels. Par conséquent, Pulu a reçu trois millions de shekels d’argent. Menahem a imposé chaque homme riche du pays de 50 shekels, en d’autres termes, il y avait 60 000 (soixante mille !) personnes en Israël suffisamment riches pour mener une certaine vie de luxe. Certains périrent dans la guerre suivante avec l’Assyrie ; beaucoup furent emmenés en captivité, mais certains d’entre eux, pratiquement toute la population « normale », tous les paysans restèrent dans le pays. Même si le chiffre donné dans la Bible est exagéré, le pays était certainement densément peuplé.

  2. L’accusation selon laquelle les Samaritains étaient idolâtres est injuste car au moment où leur pays fut détruit, l’adoration des dieux phéniciens et Cananéens était aussi très répandue dans le royaume de Juda. L’idolâtrie n’était pas seulement pratiquée par les tribus du Nord, mais par tous les Hébreux, y compris par les Juifs.

  3. Lorsque les Samaritains offrirent leur aide pour la reconstruction du Temple, les Juifs voulurent imposer leur volonté, exigeant la fin du culte sur le mont Garizim et la reconnaissance exclusive du Temple de Jérusalem comme « Maison de Dieu », quelque chose de complètement inacceptable pour les Samaritains. Ils répondirent que le Temple ne pouvait pas être le seul endroit admis pour le culte, et, en outre, que les écrits Hébreux précisaient que l’autel pour les sacrifices ne devait pas être construit avec des pierres taillées, mais avec des rochers bruts. Par conséquent, la façon de pratiquer le sacrifice, comme les Juifs se destinaient à le faire dans le nouveau Temple, était une infraction aux lois de Moïse, alors que leur adoration était correcte. Tu peux facilement imaginer ce qui s’est passé. La religion, en particulier pour tous ceux qui n’en mesurent pas toutes les subtilités, est toujours le « cheval de bataille » pour la fixation des différends politiques. Plus tard, les Samaritains ont aussi construit un Temple sur le mont Garizim, oubliant les arguments qu’ils avaient eux-mêmes avancés.

  4. La haine que les Samaritains éprouvaient à l’égard des Juifs s’est en grande partie manifestée durant la période Asmonéenne, lorsque les Juifs entreprirent des campagnes de conversion obligatoires contre les Samaritains, détruisant leur temple sur le mont Garizim, et parfois se comportant encore plus cruellement que leurs ennemis païens. Ce fut sous le règne des Asmonéens que la Galilée fut colonisée par des colons Juifs. Voilà pourquoi, à l’époque de Jésus, il y avait une Judée Juive dans le sud de la Palestine et une Galilée à moitié Juive dans le nord de la Palestine, séparées par un territoire Palestinien central.

  5. Il n’est pas exact, non plus, qu’une tension continue régnait entre les Juifs et les Samaritains. Il y avait beaucoup de liens commerciaux. Les Samaritains avaient parfois la permission de sacrifier dans le temple de Jérusalem, parfois cela leur était interdit. Certains Juifs se convertirent même au Samaritanisme. Si une hostilité continue avait régné entre les deux peuples, il serait très difficile d’expliquer pourquoi les Samaritains se sont battus, coude à coude, avec leurs compagnons Juifs contre les Romains

Très bien. Nous avons assez parlé de l’histoire des Samaritains. Je veux seulement ajouter que, dans l’antiquité, les Samaritains formaient une population nombreuse, avec de fortes colonies, dans les villes étrangères, de façon très semblable à la diaspora Juive. Mais finalement ils succombèrent sous les pressions puissantes de l’église Chrétienne qui réussit presque à les anéantir. De nos jours, seules quelques centaines de Samaritains poursuivent leur ancienne religion, principalement à proximité des villes de Naplouse et Tel-Aviv.

Maintenant, mon cher frère, nous devons encore un peu analyser la religion Samaritaine, la comparant à celle des Juifs. Comme le mot « Judaïsme » l’indique, cette religion est la version de la religion Hébraïque qui dominait parmi la tribu de Juda, ce qui veut dire qu’elle est juste un aspect d’une religion originale aux multiples facettes. Mais de cela, nous parlerons demain.

Je te remercie pour le temps que tu m’as accordé, et que Dieu te bénisse.

Judas.

© Geoff Cutler 2013

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